(à noter : les images qui illustrent ce texte sont des notes en chemin prises avec un téléphone)
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27-XII-23
Premier jour du vingtième et dernier chapitre de mon voyage andalou, commencé il y a bientôt quatre années. Quelle étrange traversée de l'Espagne, hier, intégralement noyée dans le brouillard et couverte de givre.
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Étape à Almendralejo, comme lors du tout premier périple, dans cet hôtel de bord de route, accroché à une station service, qui doit l'essentiel de son charme à l'habitude que j'ai prise d'y passer la première nuit de mes périples, quand je me dirige vers le centre ou l'ouest de l'Andalousie. Je pense à la Magdalena, la chanson de Sabina... si alguna noche por la carretera, que te conté, detrás de una gasolinera donde llené... jambon, ensaladilla rusa, vin rouge de la tierra, gin tonic... c'est parti.
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J'ai photographié l'essentiel du territoire andalou, comme le montre la carte qu'à chaque occasion je recouvre de traits, tissant une impressionnante toile d'araignée sur l'ensemble des huit provinces. La sensation que le projet s'achève monte inexorablement. Il y a un mois, alors que j'arpentais la province d'Alméria, je commençais à sentir poindre cette évidence, qui ne doit rien à la lassitude. Je fomente déjà un prochain projet espagnol. Pour l'heure, je viens tenter une dernière fois la lumière andalouse, fidèle à ce conseil que me donnais Klavdij Sluban, il y a dix ans : "Quand tu es sûr et certain que c'est fini, que tu as fait la dernière image, retournes-y encore une fois et tu feras celle qui manquait, peut-être la meilleure." J'ai pu vérifier combien cette injonction est pertinente. Alors, je reviens.
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Arpenter des espaces déjà parcourus en long et en large, en m'attachant à prendre des routes différentes. Ne pas revenir sur mes propres traces. Me garder des redites. Cette fois, la donne est un peu différente. Et puis, on ne repasse jamais deux fois par la même lumière. Du sud de l'Extrémadure jusqu'au-delà de Pozoblanco (toujours cette pointe d'émotion, à Pozoblanco, comme à Linares...), les paysages sont embrumés. Un visage de l'Andalousie inhabituel. Que le duende est facétieux! À jouer avec les perspectives et les contrastes. Ou peut-être qu'il est généreux, qu'il s'est dit que pour la dernière fois, il allait faire un tour de passe-passe à sa façon.
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Pour traverser en diagonale la province de Cordoue, je m'attache comme toujours à emprunter des petites routes incertaines, dont bon nombre ne figurent pas de la même façon sur la carte ou sur le gps, qui affiche parfois un écran blanc et l'indication : "route inconnue". Le goudron rapiécé laisse la place à une surface cabossée de terre et de cailloux, abondamment trouée de nids de poule. Toujours ce sentiment d'aller au coeur du monde, qui m'intéresse plus que le bout du monde. Tout autour, les champs récoltés étalent leur patchwork. Les reliefs tracent des lignes sensuelles, féminines. Je pense à des corps de femmes allongées, des odalisques-paysages. Parfois, l'émotion serre ma poitrine. La beauté des choses. La poésie brute du dehors. Être artiste, c'est toujours s'entretenir avec la beauté. Y puiser, la réinventer sans rien inventer de plus beau, Le soleil traverse les voiles bleus, devenus plus translucides dans l'après-midi. Après plusieurs kilomètres d'ornière, je tombe sur une chaîne qui m'empêche d'aller plus loin. Marche arrière sur plusieurs centaines de mètres. Demi-tour. Adelante!
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à suivre...
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